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J'AI EU LA FEVE (SUITE ET FIN)

Le 26/01/2010 à 13:57 dans Général

Illustration

Mon mari a eu l’idée pertinente d’appeler les pompiers, en ne leur parlant que d’un vague malaise (c’est là qu’était l’astuce ; sinon ils ne seraient pas venus, bien sûr)
Ils sont donc arrivés, et quand on leur a expliqué ce qui se passait, ils ont proposé de m’ouvrir le ventre, là, dans la cour, avec le matériel qu’ils avaient sous la main (gnôle pour l’anesthésie, haches et couteaux de cuisine pour l’extraction de la fève) Par esprit de contradiction, j’ai dit non. Ils ont alors fait preuve d’une admirable solidarité corporative puisqu’ils sont remonté comme un seul homme dans leur camion en braillant « Si tu dois sauter à la gueule de quelqu’un, ce sera pas à la nôtre, pauvre branque ! Et t’es pas une bombe, t’es un boudin ! » Et ils ont filé toutes sirènes hurlantes.
J’avoue que mon moral commençait à osciller, d’autant que mon beaup’ a proposé d’appeler un copain de son père qui avait été démineur et était maintenant parkinsonien. C’est alors que ma belle-mère, dont le sens pratique est réputé dans toute la commune, a fait observer que mon estomac étant un milieu humide et bourré de sucs gastriques, la balle allait rouiller puis se fissurer, voire se trouer. Et, a-t-elle conclu, comme tu n’es pas vaccinée contre le tétanos, et qu’un estomac tapissé de poudre à canon ne doit pas faciliter la viabilité de l’organisme, on peut raisonnablement espérer que tu vas calancher tranquillement, d’une maladie fulgurante ou d’une autre, mais du moins sans faire de mal à personne.
C’est ainsi que nous avons tous été réconfortés, et qu’il a été décidé que toute la famille irait loger chez Tante Yvonne en attendant mon extinction discrète.
Pendant que chacun faisait ses bagages, je suis montée à l’étage, et je me suis postée à la fenêtre ouverte, pour méditer sur les vicissitudes bizarres du destin.
J’étais plongée dans mes pensées lorsque mon beaup’ a violemment ouvert ma porte et a hurlé « Les paquetages sont prêts, on quitte le front, plus aucun contact avec l’arrière sauf pour annoncer ta perte ! »
Ca m’a fait sauter en l’air de surprise, et ça a déclenché une grosse crise de hoquet. Comme à chaque hoquet je risquais d’exploser, mon beaup’ n’a écouté que son courage et sa volonté de sauver sa maison et ses meubles, et s’est approché de moi par derrière pour me flanquer une grande claque amicale dans le dos qui m’a disloqué la colonne vertébrale.
Comme ça coïncidait avec un hoquet, hop ! la balle m’est sortie de la bouche, et est allée se ficher directement dans le dos d’une vache qui déambulait sous la fenêtre.
Que l’on se rassure immédiatement : la balle est arrivée sur la vache à une si petite vitesse qu’elle n’a fait qu’un minuscule trou superficiel (la preuve, le seul commentaire du ruminant a été « Tiens, les taons arrivent bien tôt, cette année ; encore une conséquence du réchauffement climatique »)
Mon mari a fait venir un vétérinaire en urgence. Celui-ci a mis un joli pansement rose sur la vache, et il lui a fallu moins de 5 heures pour replacer mes vertèbres une à une. A chaque manipulation, je poussais ce qu’il pensait être un grand cri de joie. Je n’ai pas osé démentir.
Pendant ce temps, mon beaup’ , fou de bonheur, est allé parcourir tout le canton en courant et hurlant qu’il avait enfin fait un cratère dans un rhinocéros.
Voilà donc une histoire édifiante et qui se termine bien, tous les personnages étant heureux (sauf la vache qui maudit plus que jamais le sommet de Copenhague), et qui a le mérite d’être véridique.
Bonne fête des Rois à tous !

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